Éléonore Françoise Augustine, dite Laure, Guesnon de Bonneuil, voit le jour en 1776. C’est la troisième fille de Nicolas Cyrille Guesnon de Bonneuil et de Michelle Sentuar, la nièce et filleule de Françoise Augustine Duval d’Eprémesnil. Sa mère l’emmène dans la société qu’elle fréquente. Ainsi, en 1788, chez Mme Vigée Le Brun elle participe au célèbre « dîner grec » dont tout Paris entend parler.
Dans ses Mémoires, Élisabeth Vigée Le Brun raconte qu’elle l’habille avec sa fille Julie en vestale et qu’elles chantent merveilleusement. La jeune fille vit la révolution à la campagne, à Saint-Leu-Taverny (Val-d’Oise), dans une propriété, qui appartient à sa cousine, Mme Hutot de Latour. Celle-ci accueille M. de Bonneuil et ses filles quand Mme de Bonneuil est détenue en prison à cause de son dévouement pour les Bourbon.
En 1795, elle épouse Michel Regnaud de Saint-Jean d’Angély, avocat doublé d’un journaliste. En 1796, elle accompagne son mari à Milan (Italie)? Là, ils voient régulièrement Napoléon et Joséphine mais également M. et Mme Hainguerlot, ou encore M. et Mme Hamelin.
Cette dernière se lie d’amitié avec Laure Regnaud. Elles posent l’une et l’autre pour le peintre italien Appiani qui se trouve à Milan. En 1799, Paris découvre au Salon de peinture le portrait de Mme Regnaud, peint par le baron Gérard. Ce portrait lance sa carrière mondaine.
Les hautes fonctions de son mari et son rôle d’éminence discrète de Napoléon amènent Mme Regnaud à former chez elle un salon qui est probablement le plus intéressant de la capitale. En effet, écrivains et artistes aiment s’y retrouver.
Mais ce salon est aussi un compromis des diverses appartenances politiques, bonapartistes, orléanistes et même légitimistes. Les étrangers à Paris, comme von Humboldt, et beaucoup d’autres le fréquentent aussi. Ce salon, après le Marais et la rue de la Chaussée d’Antin, se tient dans l’hôtel Regnaud, rue de Provence.
Celui-ci, lors d’un bal, est le théâtre, en 1810, d’un terrible incendie dans lequel périssent de nombreuses personnes. La comtesse Regnaud crée chez elle une antenne de secours et se dépense sans compter pour les blessés.
La beauté légendaire de Mme Regnaud et son esprit vif marquent ses contemporains. Un jour, à Saint-Cloud, Napoléon lui demande en public : «Aimez-vous toujours les hommes, Mme Regnaud ?» «Oui, sire, lui répond-elle du tac au tac, quand ils sont polis». La comtesse Regnaud est charitable et dévouée pour ses amis, comme Chateaubriand à qui elle évite, sans doute, la prison.
Brillante cantatrice, elle cultive aussi l’art de la sculpture dans l’atelier qu’elle a aménagé dans sa résidence du Val à l’Isle-Adam, une ancienne abbaye. Elle est la première, dès 1808, à la meubler dans le style gothique, contribuant ainsi à la vogue du néo-gothique qui se prolonge jusque sous la Restauration.
C’est aussi une femme politique. Après que Bonaparte ait été déporté à Sainte-Hélène et que son mari se soit exilé aux États-Unis, elle s’implique fortement dans l’opposition bonapartiste sous la Restauration. On l’arrête au prétexte d’une correspondance ayant offensé Louis XVIII.
On l’envoie, le 7 mai 1817, à la prison de la Conciergerie. Sa mère cherche à lui éviter un procès. Elle obtient l’appui de Mmes de Duras et de Jumilhac qui intercèdent en faveur de Mme Regnaud. Celle-ci doit alors s’exiler.
Réfugiée à Bruxelles en 1818, elle est accusée d’avoir financé un attentat contre lord Wellington. Elle a beaucoup de difficulté à se disculper. Puis elle s’occupe alors de son mari, revenu des États-Unis en mauvaise santé, aidée de sa sœur Sophie et du mari de celle-ci, l’écrivain Antoine Vincent Arnault.
Rentrée en France en 1821, elle vit au Val, après la mort subite de son mari, le jour de leur rentrée en France. Après la mort de l’empereur, elle fonde avec Mme Salvage de Faverolles le club bonapartiste féminin des Cotillons. De plus, elle publie plusieurs opuscules pro-bonapartistes.
Elle meurt le 8 février 1857, peu après avoir été invitée à une réception aux Tuileries par Napoléon III en l’honneur de quelques dames du Premier Empire. Elle repose avec son mari, l’avocat et journaliste Michel Louis Etienne, comte Regnaud de Saint-Jean d’Angely (1761-1819).
Publications :
- Napoléon (Paris, 1851) ;
- L’Empire (Paris, 1852) ;
- La France est constante (Paris, 1858, publié post mortem).
Sources : Geneanet. Date de création : 2019-04-11.