Lucien Anatole Prévost-Paradol nait à Paris, le 8 août 1829. Il est le fils de Vincent François Prévost et d’Anne Catherine Lucinde Paradol.
En fait du côté paternel, il est le fils de Léon Halévy, disciple de Saint-Simon. Si elle l’a rendu sensible à la condition des Juifs en France, une origine à demi-juive et connue des contemporains, n’est pas, au XIXème siècle une chance de succès. Certains la lui reprocheront lors de son entrée à l’Académie Française et lors de son ralliement à Napoléon III.
Lucien Anatole Prévost-Paradol fait ses études au Collège de Bourbon et à l’École normale supérieure, en même temps que Fustel de Coulanges; élève brillant il devient très vite le major de sa promotion.
Lors du coup d’Etat du 2 décembre 1851, Prévost-Paradol, major de troisième année, ce qui l’autorise à parler au nom de l’Ecole toute entière, se rend au bureau du directeur pour protester contre le coup d’Etat et l’assurer que l’Ecole se range du côté de l’Assemblée.
Une heure plus tard, des soldats remplissent la rue d’Ulm et on consigne l’école. Les agrégations nobles, philosophie, histoire, supprimées, un régime de « haute surveillance » instauré, Prévost-Paradol donne sa démission sans avoir terminé son temps. Désirant entrer dans l’enseignement supérieur, il expédie les deux thèses nécessaires.
Très soutenu par ses anciens maitres il obtient une chaire de littérature à la faculté d’Aix en 1855. Il n’occupe cette fonction que pendant un an et démissionne pour devenir l’un des principaux rédacteurs du Journal des Débats. On se l’arrache. Il collabore également au Courrier du dimanche et, très brièvement, à La presse.
Il devient l’un des principaux journalistes politiques de son temps et reçoit des offres du Journal de Genève, de L’Evening Post. Le Times publie son étude de la presse en France et en Angleterre. C’est l’un des principaux représentants de l’opposition libérale au Second Empire, ce qui lui vaut un séjour en prison (« A la première occasion on le salera » dit le baron de Heckeren).
En fait, c’est un mois de prison qu’il fait dans d’assez bonnes conditions à la maison de santé du docteur Blanche. En 1865, il devient membre de l’Académie Française, en remplacement de Jean-Jacques Ampère. Cette élection suscite le scandale en raison du jeune âge de l’intéressé et de la faiblesse de son bagage littéraire, qui se compose essentiellement de ses Essais de politique et de littérature (3 séries, 1859-1866) et d’ Etudes sur les moralistes français (1864). Il publie, en 1868, ce qui reste son œuvre majeure : La France nouvelle.
Avec l’arrivée au pouvoir d’Émile Ollivier, Prévost-Paradol croit à une évolution libérale de l’Empire. Il accepte donc le poste de ministre plénipotentiaire de France aux États-Unis, ce qui lui vaut de très violentes attaques de la part du parti républicain.
À peine était-il installé dans son poste que la guerre de 1870 éclate. C’est la guerre qu’il a annoncée et redoutée dans La France nouvelle. Désespéré, Prévost-Paradol se suicide d’un coup de revolver à Washington (Etats-Unis), le 20 juillet. Prévost-Paradol a prévu la montée en puissance de l’Allemagne qui va supplanter la France comme puissance dominante en Europe.
Cependant, il voit encore plus loin et prédit que cette domination sera de courte durée. En effet, il analyse la démographie des principales puissances de l’époque, les États-Unis, l’empire Britannique, la Russie et l’Allemagne. Ces quatre empires connaissent une expansion démographique très importante, qui sera à la base de leur puissance.
Cependant, l’expansion démographique de l’Allemagne est très supérieure à celle de la France. Cela génère un courant d’émigration en Amérique du Nord, ce qui renforce les Anglo-Saxons. Selon Prévost-Paradol, la volonté de l’Allemagne d’occuper la première place est impossible parce que l’espace terrestre est déjà partagé et qu’elle arrive trop tard. Cette expansion va provoquer un conflit avec les puissances déjà en place, les États-Unis, l’Empire Britannique et la Russie. Car ceux-ci ne manqueront pas de se coaliser pour écraser l’Allemagne.
C’est ce qui se passe et Prévost-Paradol le prédit quatre-vingt ans avant, en 1870 ! Il repose avec son fils qui met fin à ses jours à l’âge de 17 ans.
Extrait (du journal Le Petit parisien du 22 décembre 1877) :
« Les obsèques du jeune Prévost-Paradol, mort d’une façon si tragique, ont eu lieu ce jour à dix heures et demie. M. Halévy et son fils conduisaient le deuil. L’assistance est nombreuse. Nous avons remarqué dans le cortège MM. Francisque Sarcey, Meilhac et le docteur Blanche. Le défunt étant protestant, le convoi s’est rendu immédiatement au cimetière du Père-Lachaise.
Le suicide, d’après certains médecins, est une folie souvent héréditaire. La mort du jeune Prévost-Paradol, fils du célèbre publiciste, vient donner raison à cette thèse. Ce malheureux jeune homme s’est brûlé la cervelle dans l’appartement de son subrogé-tuteur, M. Ludovic Halévy, rue de Douai.
Il est âgé de dix-sept ans à peine. C’est ainsi que son père a mis fin à ses jours. On se demande quelles causes ont pu pousser ce jeune homme à se donner la mort. On parle de chagrins intimes et d’une passion malheureuse que le pauvre enfant n’aurait pas pu surmonter. »
Sources : Site de l’Académie Française ; Le Petit Parisien (22 et 23 décembre 1877). Date de création : 2008-12-29.