Imre Nagy nait à Kaposvár (Hongrie), le 7 juin 1896, dans une famille paysanne. Il sert comme apprenti chez un serrurier avant de servir dans l’armée austro-hongroise pendant la Première Guerre mondiale. Il est fait prisonnier en 1915 et interné près d’Irkoutsk. A cette occasion, il se convertit au marxisme. Dès 1917, il rentre au POSDR (le nom du Parti communiste russe d’alors) et lutte pendant la Guerre civile dans les rangs de l’Armée rouge.
Il revient en Hongrie et il participe au gouvernement soviétique hongrois de Béla Kun. Mais, en 1927, avec le durcissement de la répression anti-communiste, il préfère se réfugier à Vienne puis, en 1930, à Moscou. Ses bonnes relations avec Boukharine lui valant des ennuis. On lui recommande de devenir collaborateur de la NKVD. Ceci lui permet d’échapper aux grandes purges staliniennes qui affectent aussi la communauté hongroise exilée en Union soviétique.
Pendant la guerre il travaille à Radio-Kossuth qui produit des émissions en langue hongroise. Revenu au pays en 1944, il met en œuvre l’année suivante la réforme agraire en Hongrie comme ministre de l’Agriculture du Parti communiste magyar. Le 13 juin 1953, dans le cadre de la déstalinisation, il remplace Mátyás Rákosi au poste de premier ministre. Il met en route une politique de réforme radicale. Il devient alors pour beaucoup de Hongrois celui qui porte l’espoir d’un avenir meilleur.
Imre Nagy préconise l’idée d’une « Nouvelle voie », rappelant quelque peu la NEP de Lénine et précurseur du « Socialisme à visage humain » d’Alexander Dubcek. Cette politique déplait aux caciques du Parti et le groupe stalinien de son prédécesseur Rákosi s’y oppose radicalement. Ayant perdu le soutien du Politburo de Moscou, Imre Nagy est relevé de ses fonctions le 14 avril 1955 par la direction du Parti communiste Hongrois. Quelques mois plus tard, il est exclu du parti.
On annule la plupart de ses réformes dans la phase de restauration qui s’ensuit. En février 1956, le « discours secret » de Nikita Khrouchtchev mettant en cause ouvertement le stalinisme fait boule de neige dans les pays du bloc communiste : on exige maintenant une révision de la ligne du Parti en Pologne où éclatent les émeutes de Poznań, à Budapest on remplace à la présidence du Parti, le stalinien Matyás Rákosi par Erno Gero.
Mais cela ne suffirait pas pour apaiser le mécontentement, en particulier celui des étudiants et des intellectuels. En Hongrie, le 23 octobre 1956, les protestations étudiantes – officiellement entamées pour soutenir les ouvriers de Pologne – tournent à l’insurrection populaire. Le comité central du Parti communiste appelle une nouvelle fois Imre Nagy à la tête du gouvernement.
Le 28 octobre, Nagy devient ministre-président. Il forme un gouvernement pluripartite et exige une démocratie parlementaire, retire ses armées du Pacte de Varsovie le 31 octobre. Le 1er novembre, il proclame la neutralité de la Hongrie auprès des instances de l’ONU tout en appelant les grandes puissances à la garantir. Appel aux grandes puissances pour garantir la neutralité de la Hongrie.
C’est énorme et audacieux en pleine guerre froide, mais sans le soutien de Moscou, c’est peu ou rien. Si l’armée et la police hongroises se rangent à ses côtés, il reste des troupes russes stationnées en Hongrie. Imre Nagy négocie avec Moscou pour obtenir une sorte de statut spécial pour son pays.
Secrètement János Kádár, l’ennemi de Nagy, s’entend avec les Soviétiques. Il prépare un coup d’État soutenu par les troupes russes prêtes à marcher vers l’ouest, proclamant illégal le gouvernement de Nagy. Le 4 novembre 1956, les chars soviétiques entrent en Hongrie et noient dans le sang l’insurrection populaire.
La bataille, qui dure à Budapest jusqu’au 15 novembre, coûte la vie à environ 3 000 Hongrois. Malgré ce qu’a annoncé Radio Free Europe, l’Occident n’intervient pas. Nagy organise la résistance en Hongrie occidentale. Il laisse ouvertes certaines routes vers l’Autriche par lesquelles, jusqu’au 21 novembre 1956 environ, 210 000 Hongrois quittent le pays.
Lui-même trouve asile dans l’enceinte de l’ambassade de Yougoslavie qui est, 3 semaines durant, cernée par les chars. Assuré d’un sauf-conduit par Kádár, le nouveau chef du gouvernement, Imre Nagy quitte l’ambassade le 22 novembre 1956. Mais le KGB l’arrête immédiatement avec ses compagnons et le déporte en Roumanie.
Son procès se déroule deux ans plus tard. À la fin d’un simulacre de procès, il déclare : « Je suis sûr que le mouvement ouvrier international et le peuple hongrois me réhabiliteront. Je suis la victime d’une grave erreur de justice. Je ne demande pas à être gracié ».
Après sa condamnation pour « conduite contre-révolutionnaire », on exécute Nagy le 16 juin 1958 dans la prison de Budapest par pendaison. Détail sordide, on jette le corps d’Imre Nagi dans une fosse couché face contre terre, comme pour les traitres, selon une ancienne coutume.
Après le « tournant » de 1989, Imre Nagy reçoit des obsèques populaires et nationales (le 16 juin 1989) et le parti le réhabilite officiellement un mois plus tard. Depuis longtemps, le transfert de son cercueil est réclamé, entre autres en 1988 par le chef des étudiants de Budapest, plus tard ministre-président, Viktor Orbán.
Sources : Marai (Sandor) Mémoires de Hongrie, Albin Michel, 2004, 423p. ; Wikipedia. Date de création : 2008-09-26.