Philippe Max Lebaudy voit le jour à Paris, au 73, boulevard Haussmann, en 1873. C’est le troisième fils de Jules Lebaudy (1828-1892) et d’Amicie née Piou (1847-1917).
Au printemps 1892, son père l’envoie réviser les épreuves du baccalauréat sur la Côte d’Azur. Le lycéen découvre le jeu au casino de Monte-Carlo mais aussi toute une faune, mêlant demi-mondaines et tapeurs. Son père meurt quand Max est encore mineur, en lui laissant plus de 30 millions de francs.
En juin, sa mère, qui doit gérer l’héritage de Jules, lui coupe les vivres au motif que son fils suit une mauvaise pente. Devenu bachelier, elle exige de lui qu’il embarque à bord du Sémiramis, pour une expédition scientifique menée par Louis Lapicque et qu’elle finance.
Refusant d’obéir, Max, via son avocat René Waldeck-Rousseau, attaque sa mère en justice. Celui-ci se charge de fustiger « une mère pieuse et tout sauf charitable ». C’est déjà un premier scandale. Max obtient une grande partie de son héritage le jour de ses 21 ans, en janvier 1894.
Il se lance alors dans diverses opérations dont l’achat de chevaux de courses et d’un yacht, imitant ses deux frères, Jacques et Robert. Il cherche aussi à soigner ses poumons car il souffre sans doute d’une forme de tuberculose. Enfin, il s’essaye au cyclisme et tente même de concourir. En juin 1895, Max achète le quotidien Le Soir, et en fait un journal turfiste, rebaptisé Le Soir tiercé.
Appelé sous les drapeaux malgré sa maladie, il refuse d’être exempté. Il meurt subitement le 24 décembre 1895 au sanatorium militaire d’Amélie-les-Bains (Pyrénées-Orientales). Il repose avec son père, Jules Lebaudy (1828-1892), financier et industriel du sucre, sa mère, la philanthrope Marguerite Amicie Piou (1847-1917), son frère, Louis Robert Lebaudy (1869-1931), éleveur de chevaux lui aussi, son neveu, l’aviateur mort pour la France, Hubert Jules de Fels (1891-1916), et la sœur de ce dernier, Anne Marie Edmée Boisgelin, née de Fels (1893-1922).
L’affaire du « Petit Sucrier »
Le Racing Illustrated londonien s’émeut, le 25 mars 1896, qu’un aussi jeune et prometteur propriétaire de chevaux, connu en Angleterre, se soit si facilement laissé abuser par tant de maîtres chanteurs.
La nouvelle des circonstances de la mort de Max place les Lebaudy au centre d’une campagne de presse où s’expriment les grandes plumes de l’époque.
Le contexte est assez explosif. D’un côté le capitaine Dreyfus a été condamné quelques mois plus tôt et l’armée française en sort peu grandie. De l’autre, le scandale de Panama éclabousse des pans entiers de l’élite politique et financière.
Début 1894, Max Lebaudy confie 17 millions à la Société française de banque et de change (SFBC) codirigée par Louis Alfred Balensi, lequel prend la fuite avec d’importantes sommes en liquide le 26 décembre 1895, soit deux jours après le décès de Max. Ce trou financier provoque la faillite de la SFBC. De plus, de nombreuses reconnaissances de dettes sont découvertes chez Max. La famille Lebaudy décide alors d’avoir recours à la justice.
Le 6 janvier, sept personnalités sont arrêtées pour tentative de chantage et d’extorsion en association contre la personne de Max Lebaudy. Le procès s’ouvre le 9 janvier 1896. L’affaire n’est pas simple et la presse l’embrouille.
Max est mort militaire mais l’armée n’a rien à voir avec ce scandale. Certains journalistes en jugent autrement. On qualifie Max de « petit sucrier » et de « gentil fils à papa victime de la Grande Muette et de parasites ». On érige bientôt son martyre en exemple : la une du Petit Journal illustré du 26 janvier en constitue l’apothéose.
Dès le 15 janvier, constatant la curée, Octave Mirbeau dénonce l’attitude de certains de ses confrères. Les personnalités arrêtées passent en jugement à partir du 10 mars. Le tribunal rend ses conclusions le 26 mars.
Les juges constatent que le jeune homme a payé grassement différents réseaux, liés aux courses hippiques et au monde de la nuit. Ils indiquent que bon nombre d’intermédiaires ont abusé de sa prodigalité. Mais le désir de Max était de prendre tout sa part dans la société. Il a donc voulu faire son service militaire, « comme les gens normaux ». Puis il l’a regretté car la fièvre typhoïde l’a emporté. Une bien triste affaire en forme de gâchis, en somme.
Sources : Wikipedia. Date de création : 2022-01-12.