Marguerite Amicie Piou voit le jour le 27 juillet 1847, à Lyon (Rhône). C’est la fille de Constance Piou et de Palmyre Le Dall de Kéréon, grands bourgeois. C’est la sœur de Jacques Piou qui sera l’un des leaders politiques de la droite.
Le 13 décembre 1865, à Toulouse (Haute-Garonne), elle épouse le riche financier Jules Lebaudy et vient à Paris où elle tient un salon fréquenté par les grandes familles catholiques.
À la suite de l’effondrement de la banque catholique Union générale, en 1882, causé en partie par les manipulations boursières de son mari, Amicie Lebaudy prend conscience, devant son salon déserté, que son mari est un coquin. Elle considère que l’argent de sa fortune est sale. Cette fortune est évaluée à près d’un quart de milliard de franc-or, soit l’une des dix premières fortunes françaises. Elle en reçoit pourtant sa part, à la mort de son mari, en 1892.
Peu de temps après, elle décide de s’investir dans les œuvres sociales. Elle vend alors son logement et s’installe dans un petit deux-pièces dans le quartier Saint-Lazare.
Le 4 mai 1897, à Paris, l’incendie du Bazar de la charité fait 136 morts, 126 femmes et 10 hommes. Parmi ces femmes, il y a la duchesse d’Alençon (1847-1897), sœur de Sissi, impératrice de l’Autriche. En 1898, le journal Le Figaro lance une campagne de souscription pour venir en aide aux familles des malheureuses victimes qui ne faisaient pas toutes partie de l’aristocratie parisienne.
Or, un jour, le journal reçoit en un seul versement une souscription de 937 438 francs ! Mais qui est ce souscripteur anonyme capable de donner presque un million de francs se demandent les Parisiens ? Le journal La Libre Parole révèle son nom : Amicie Piou, veuve Lebaudy.
Dans la plus grande discrétion, Amicie Lebaudy finance la fondation du Groupe des Maisons Ouvrières (GMO), en 1899. Elle reste inconnue de celui-ci jusqu’au lendemain de sa mort. En effet, seul le président du Groupe reçoit d’elle, directement de la main à la main, et sans reçu, les sommes nécessaires à l’achat des terrains et à la construction de ces groupes d’immeubles.
Le GMO s’occupe de construire des immeubles salubres, à bon marché, en vue de leur location à des ouvriers ou employés vivant de leur salaire à Paris ou en banlieue parisienne. Le GMO finance aussi la construction de l’hôpital de l’Institut Pasteur. C’est une des pionnières du logement social. GMO devient ensuite la Fondation Madame Jules Lebaudy. La fondation loge aujourd’hui plus de 6 500 personnes.
Les immeubles du 94 rue de Charonne (11ème), du 124-126 avenue Daumesnil (12ème), du 5-7 rue d’Annam (20ème), du 5 rue de la Saïda, de la rue de l’Amiral-Roussin, du 6-18 rue de Cronstadt et une partie de l’hôpital Saint-Michel (15ème) à Paris lui appartiennent.
Elle finance aussi, à hauteur de 585 000 francs, le phare de Kéréon, dans le Nord-Finistère, à condition qu’il porte le nom de son grand-oncle Charles Marie Le Dall de Kéréon, enseigne de vaisseau, guillotiné sous la Terreur à l’âge de 19 ans.
Amicie Lebaudy devient aussi la bienfaitrice du Collège Saint-Alexandre de Gatineau (Québec, Canada). Elle donne à Mgr Alexandre Le Roy la somme de 200 000 $ pour l’achat d’une propriété et l’établissement d’une école d’agriculture. Et c’est en sa présence que l’Institut Saint-Alexandre est inaugurée, le 11 juin 1905.
Sept ans plus tard, la Congrégation des Pères du Saint-Esprit fonde le Collège apostolique Saint-Alexandre. Affilié à l’Université Laval, c’est l’un des meilleurs collèges au Québec. En 1967, il devient un établissement d’enseignement secondaire privé.
Par ailleurs, Amicie Lebaudy écrit des ouvrages sur le jansénisme, sous le pseudonyme de Guillaume Dall. Enfin, elle donne aussi beaucoup d’argent pour la restauration de l’abbaye de Port-Royal des Champs.
Elle meurt à Paris, le 3 mai 1917. Elle repose avec son mari, Jules Lebaudy (1828-1892), financier et industriel du sucre, ses fils, Louis Robert Lebaudy (1869-1931), et Philippe Max Lebaudy (1873-1895), tous deux éleveurs de chevaux, son petit-fils, l’aviateur mort pour la France, Hubert Jules de Fels (1891-1916),et la sœur de ce dernier, la comtesse Anne Marie Boisgelin, née de Fels (1893-1922).
Hommages : Un square de Paris (20ème) porte son nom.
Sources : Le droit.com https://www.ledroit.com/2021/04/18/amicie-piou-lebaudy-femme-de-cur-72b48f1d2695caa902dfd685bdc61073. Date de création : 2022-01-12.