Félia Litvinne, de son vrai nom Françoise Jeanne Schütz, d’origine russe d’ascendance allemande et canadienne, voit le jour le 29 août 1863 à Saint-Pétersbourg (Russie).
Emigrée et fixée en France, elle se fait naturalisée française. Elle étudie avec Barthe-Barderali, Pauline Viardot et Victor Maurel (pour la scène) qui la fait débuter en 1883 au Théâtre Italien dans le rôle d’Amélia dans Simon Boccanegra de Giuseppe Verdi en remplacement de Fides Devries.
Un peu plus tard, elle y chante Elvira dans Ernani de Giuseppe Verdi. En 1885, elle voyage beaucoup, on l’entend à Bordeaux, à Genève et à Barcelone. Au cours de la saison 1885-1886 et grâce au mariage de sa sœur avec Edouard de Reszké, elle chante à New York avec la Compagnie Mapleson.
Puis de 1886 à 1888, elle se fixe à La Monnaie de Bruxelles où elle interprète L’Africaine de Meyerbeer, Sigurd de Reyer, La gioconda de Ponchielli, «Hamlet» d’Ambroise Thomas et la première Brünhild dans la «Walkyrie» de Wagner en version française.
En 1888, en Italie, elle chante la Reine (Hamlet), à Rome, et, à La Fenice de Venise, Valentine (Les Huguenots de Meyerbeer). Elle reprend ce rôle à l’Opéra de Paris et au San Carlo de Naples en 1890.
L’année suivante, on la retrouve dans les théâtres impériaux de Moscou et de Saint-Pétersbourg. Elle y chante dans Cavalleria rusticana de Pietro Mascagni et Judith d’Alexandre Serov. Elle interrompt son activité pour épouser Jean Marie Depoux, le 16 août 1893.
En 1895-1896, elle reprend son activité pour chanter dans Samson et Dalila, de Camille Saint-Saëns, à Monte-Carlo. Elle parait ensuite au Metropolitan Opera, à New-York, dans Les Huguenots, Aïda, Don Giovanni, Siegfried et l’Africaine.
Elle devient une wagnérienne célèbre, soprano dramatique, sa voix est puissante, étendue, homogène et naturellement émouvante. C’est la première Isolde de Paris en 1899 et la première Brünhild des Tétralogies intégrales de Bruxelles, en 1903, et Paris, en 1911. Puis c’est la première Kundry dans Parsifal, à Monte-Carlo, en 1913.
Elle chante le «Crépuscule des dieux» de Richard Wagner, en 1907, à la Scala sous la direction de Toscanini. Elle est considérée comme la plus grande Alceste de Christoph Willibald Gluck de l’histoire. Sa voix, aussi imposante que son physique, est une des rares voix féminines à supporter l’épreuve de l’enregistrement (une quarantaine).
Elle se retire de la scène en 1916 et se consacre alors à l’enseignement. Elle a de nombreux élèves : Koshetz, Denya, Germaine Lubin… Félia Litvinne s’éteint à Paris, le 12 octobre 1936. Ses obsèques sont célébrées à l’église d’Auteuil.
Publications : Exercices et Conseils (1924) ; Ma Vie et Mon Art (1933).
Extrait (du journal Nouvelliste d’Indochine du 12 octobre 1936) : «
Mort de la cantatrice Félia Litvinne. La grande et célèbre cantatrice s’est éteinte dimanche soir à 20 h 45, cédant à une crise de diabète, au Cercle familial d’Auteuil, 1 ter rue Chevez, où elle habitait depuis trois ans. Elle avait réuni là quelques meubles qu’elle avait pu garder du temps de sa splendeur et, souffrante, vivait de son art. Elle continuait à enseigner le bel canto à quelques élèves privilégiés et à évoquer souvent les fastes inouïs de sa prodigieuse carrière.
Félia Litvinne est sans doute une des plus grandes artistes lyriques de notre époque. Sa réputation est mondiale. Sa voix, un enchantement de l’esprit, est tout pour elle. C’est avec une certaine mélancolie qu’elle évoquait les railleries dont elle est toujours l’objet à propos de « ses formes puissantes ». Elle avait tout tenté pour maigrir, mais en vain.
Cependant dès qu’elle chantait, une divine métamorphose s’opérait et l’on ‘apercevait plus que le rayonnement incomparable de son âme. Elle est née à Petrograd, le 31 août 1863. Petite-fille de l’honorable Monroe qui fonda au Canada la province de Toronto et inspira à Fenimore Cooper son roman, Le dernier des Mohicans, son père est Russe et sa mère Canadienne. Toute enfant, elle se révéla exceptionnellement musicienne.
On la mena à Paris où elle étudia le chant auprès des traîtres Barthe-Banderali et Victor Maurel. Quand elle était prête à aborder la scène, le Théâtre Italien organisa ses débuts dans Simone Boccanegra et dans Hernani. C’est en 1882. Sa voix de soprano dramatique et la puissance de son jeu de tragédienne, firent une grande impression sur ses auditeurs.
Une incomparable artiste, l’égale d’une Melba ou d’une Patti est née. Dès lors, c’est pour Félia Litvinne l’occasion de commencer sa longue randonnée de gloire. Elle se classe la wagnérienne type, joue la Walkyrie à la Monnaie de Bruxelles, puis les Opéras de Paris, de Naples, de Venise, la Scala de Milan, le Théâtre Impérial de Saint-Pétersbourg se partagent ses triomphes… »
Distinctions : chevalier de la Légion d’honneur (6 mai 1935) ; officier de l’instruction publique.
Pour écouter Félia Litvinne dans Pleurez mes yeux, extrait du Cid de Massenet (1906)
Sources : Cardinne-Petit (Robert) article publié dans Le Nouvelliste d’Indochine, édition du 31 octobre 1936 ; Litvinne (Félia) Ma vie et mon Art, Paris, 1933 ; Histoire de l’Opéra, Paris, 1963 ; Wikipedia ; Base Léonore (Légion d’honneur). Date de création : 2007-02-10.