Louis Poinsot voit le jour le 3 janvier 1777, à Clermont-en-Beauvaisis (Oise). Fils d’un épicier de Beauvais, il fait ses classes de rhétorique au Lycée Louis-le-Grand à Paris (1789-1793). Élève brillant en littérature classique, il se présente au premier concours d’entrée à l’École polytechnique. Malgré son ignorance de l’algèbre, on l’admet en 1794. Entré à l’école d’application des Ponts et Chaussées, en 1797, il y obtient le prix de mécanique pour un projet de scie à recéper les pieux sous eau.
Louis Poinsot fait des recherches sur la résolution des équations algébriques et il met au propre ses notes de cours sur la statique. Il publie les Éléments de statique (1803), salués comme un livre aux qualités didactiques exceptionnelles. Il remplace dans l’enseignement technique la Statique de Charles Bossut et on rééditera onze fois jusqu’à ce que la discipline devienne une simple conséquence de la Dynamique. Poinsot renonce alors à la carrière d’ingénieur et devient professeur de mathématiques au lycée Bonaparte.
Reconnu à présent par l’Institut, il dépose un mémoire (imprimé ensuite sous le titre de Théorie générale de l’équilibre et du mouvement des systèmes) critiquant le principe des travaux virtuels. Or ce principe est choisi par Joseph Louis Lagrange pour axiomatiser la statique dans sa Mécanique analytique (1788). Lagrange, qui est alors le doyen et l’autorité suprême de l’Institut, s’émeut de la témérité du jeune auteur. Pourtant, il lui reconnait de la rigueur et du courage. Il lui obtient la charge d’inspecteur des universités, en 1808. À ce poste, Louis Poinsot s’applique à promouvoir l’enseignement des sciences, alors presque inexistant, dans les universités et surtout les lycées.
En littérature, il recommande aux professeurs de limiter leurs cours à un petit nombre d’œuvres choisies. Il encourage la mémorisation des textes classiques. Reprenant les observations d’Adrien Marie Legendre sur les polyèdres, il décrit deux polyèdres réguliers étoilés non encore examinés, et montre par un argument combinatoire qu’il n’y en a pas d’autres, en 1809.
À la mort de Lagrange, en 1813, Louis Poinsot entre à l’Institut dans la classe de mathématiques. Mais à la Restauration, comme d’autres dignitaires du régime impérial, il est relégué de ses différents postes. Ses relations avec Siméon Denis Poisson se dégrade. A l’avènement de Charles X (ordonnance du 22 septembre 1824), on lui enlève l’inspection générale. Soupçonné de libéralisme politique, son enthousiasme pour le Système de Politique Positive d’Auguste Comte l’écarte encore un peu plus du pouvoir.
Dans son effort pour géométriser la mécanique, Louis Poinsot met en évidence l’importance de la notion de moment. Il montre comment réduire à un torseur un système de forces agissant sur un solide. Dans sa Théorie nouvelle de la rotation des Corps (1834), il démontre que le mouvement d’un solide se décompose en une rotation instantanée autour d’un axe et une translation instantanée parallèle à cet axe.
Puis il montre que le mouvement d’un solide autour d’un point fixe (« mouvement à la Poinsot »), peut être illustré par le roulement d’un cône solidaire du solide, sur un cône fixe. Son étude sur le mouvement du cône généralise celle d’Euler sur la toupie (cône en rotation autour d’un axe fixe). Le classicisme de Poinsot l’amène à réfuter la théorie mathématique de l’élasticité alors en plein essor. En effet, celle-ci introduit, selon lui sans nécessité, des hypothèses supplémentaires à la mécanique du point et des solides rigides.
Joseph Bertrand rapporte :
«Curieux de la théorie des corps solides, il la sépare entièrement de celle des corps élastiques.»
Ni Navier, ni Poisson, ni Cauchy, ni Lamé ne réussissent à lui faire discuter leurs principes.
«Ils parlent de pressions obliques, dit-il avec répugnance, cela n’est pas pur, une pression est toujours normale»,
Il éloigne de son esprit cette image et repose aussitôt sa vue sur les corps abstraits, c’est-à-dire absolument rigides, et terminés par des surfaces géométriques d’un poli tellement parfait, qu’on ne doit pas même en parler. « Un poli imparfait, une surface rugueuse, qu’entendez-vous par là, je vous prie, en tant que géomètres ? »
Louis Poinsot pense que l’on peut mathématiser la théorie des corps déformables par des considérations de résultante et de couple entre points matériels. Ses idées influencent les frères Cosserat.
Après les journées de 1830, l’étau se desserre autour des tenants du Positivisme et des libéraux en général. Élu au conseil de perfectionnement de l’École polytechnique, il devient astronome au Bureau des longitudes en 1839. Il ne retrouve le poste de Conseiller Royal pour l’Instruction Publique qu’au départ de Siméon Denis Poisson, en 1840.
Critiqué par Auguste Comte pour son soutien insuffisant contre la candidature de Charles Sturm à l’École polytechnique, il doit redoubler encore de prudence lorsque le père du Positivisme est évincé de cet établissement en 1845.
Soucieux de promouvoir l’enseignement des mathématiques en France, il fait ouvrir en 1846 une chaire de géométrie supérieure à la Sorbonne, confiée à Michel Chasles. Au rétablissement de l’empire, en 1852, il devient sénateur. Louis Poinsot s’éteint le 5 décembre 1859, à Paris.
Publications :
- Éléments de statique (1803) ;
- Mémoire sur la composition des moments et des aires dans la Mécanique (1804) ;
- Mémoire sur la théorie générale de l’équilibre et du mouvement des systèmes (1806) ;
- Sur les polygones et les polyèdres (1809) ;
- Théorie et détermination de l’équateur du système solaire (1828) ;
- Théorie nouvelle de la rotation des corps (1834) ;
- Théorie des cônes circulaires roulants (1853).
Titres : Pair de France (1852).
Distinctions : La légion d’honneur mentionnée dans l’inscription ne figure pas dans la Base Léonore.
Hommages : Son nom est inscrit sur la tour Eiffel.
Sources : Jouin (Henry) La sculpture dans les cimetières de Paris, 1898, page 62 ; Site de l’Académie des Sciences ; Base Léonore (Légion d’honneur) ; Wikipedia. Date de création : 2008-01-31.