Chantal Akerman voit le jour le 6 juin 1950, à Bruxelles (Belgique). Elle vient d’une famille juive polonaise. Ses grands-parents et sa mère, Natalia, ont été déportés à Auschwitz, seule sa mère en est revenue. Son père est Alexis Akerman.
C’est Pierrot le fou de Jean-Luc Godard qui provoque sa vocation. Formellement, Michael Snow est sa deuxième profonde influence. Elle déclare le 5 juin 2004 au Centre Pompidou :
« Godard m’a donné de l’énergie et les formalistes m’ont libérée. »
Son travail est contemporain de celui du Wim Wenders des débuts. André Delvaux la soutient dès son premier court métrage (Saute ma ville, 1968). C’est un film pré-punk où l’adolescente exprime de manière explosive son besoin vital de libération. Elle fait un court passage à l’Institut national supérieur des arts du spectacle, en 1967-19681 où elle claque la porte après trois mois.
Elle réalise, en 1971, L’enfant aimé ou je joue à être une femme mariée, un deuxième film (depuis longtemps invisible) qu’elle n’estime pas assez construit, précis, ni dirigé. Chantal Akerman part ensuite, avec Samy Szlingerbaum, à New York où elle fréquente assidûment l’Anthology Film Archives (cinémathèque). Elle y découvre le cinéma expérimental américain (Michael Snow, Andy Warhol, Jonas Mekas, etc. ).
« Ils m’ont ouvert les yeux sur beaucoup de choses : les rapports entre un film et son propre corps, le temps comme la chose essentielle d’un film, le temps et l’énergie. C’est en regardant leurs films que j’ai trouvé le courage de tenter autre chose. »
Vivant de petits boulots, elle est parvient à tourner plusieurs films : en 1972, La Chambre, un court-métrage à base d’un lent panoramique horizontal qui balaie l’espace à 360 degrés plusieurs fois, et Hôtel Monterey, 63 minutes, une suite de plans fixes précisément cadrés et de lents travellings dans les couloirs, puis la caméra sort de l’immeuble par le toit où un panoramique balaie l’horizon urbain.
Enfin, en 1973, elle réalise Hanging Out Yonkers. C’est son premier essai de documentaire, sur des adolescents à problèmes fréquentant un centre social, mais inachevé. Les rushs sont parfois projetés en cinémathèque ou lors de rétrospective. Chantal Akerman vit ensuite à Paris.
Elle retourne à New York en 1976, après sa reconnaissance internationale, pour réaliser News from Home (89 minutes), une lecture des lettres inquiètes et plaintives que lui envoyait sa maman pendant son séjour, accompagnée par des plans monumentaux (façades, rues, métro) de la mégapole. Le film se clôt par un très long travelling arrière, la caméra posée sur un bateau s’éloignant des tours jumelles du World Trade Center.
La cinéaste reviendra dans cette ville pour tourner Histoires d’Amérique en 1988 et Un divan à New York en 1996. Dans le Nouvel Observateur, en 1989, Chantal Akerman explique :
« Je me retournais dans mon lit, inquiète. Et brusquement, en une seule minute, j’ai tout vu Jeanne Dielman. . . »
Jeanne Dielman, 23, quai du Commerce, 1080 Bruxelles (1975) est son chef-d’œuvre, une description méticuleuse, en illusion de temps réel (proche de l’hyperréalisme) de l’aliénation, avec Delphine Seyrig :
« C’est un film sur l’espace et le temps et sur la façon d’organiser sa vie pour n’avoir aucun temps libre, pour ne pas se laisser submerger par l’angoisse et l’obsession de la mort ».
Les Rendez-vous d’Anna (1978) avec Aurore Clément, est un film autobiographique, road movie en train d’Allemagne à Paris. La comédie musicale Golden Eighties (1986) est une variation à la Jacques Demy de ses thèmes habituels avec Lio. Un divan à New York (1996), avec William Hurt et Juliette Binoche, est sa tentative de comédie romantique américaine à la Ernest Lubitsch (ou à la Woody Allen).
La Captive (2000), avec Sylvie Testud et Stanislas Merhar est son adaptation, écrite avec Eric de Kuyper, de La Prisonnière de Marcel Proust, influencée par Vertigo d’Alfred Hitchcock et les mélodrames morbides d’Ievgueni Bauer.
En 2006, Chantal Akerman détourne une commande (un documentaire sur Israël) pour revenir à un travail plus personnel. C’est son film le plus intime depuis les années 1970. Une voix off autobiographique accompagne des plans fixes hyperréalistes tournés en vidéo à Tel-Aviv puis monté à Paris. C’est sur l’exil des autres, l’exil de soi-même, le repli sur soi, le déséquilibre mental et les tâches ménagères qui deviennent des « actes héroïques de la vie quotidienne ». La conclusion de ce film, intitulé Là-bas, est : « Le paradis n’existe pas. »
La cinéaste, qui souffre de troubles maniaco-dépressifs, se suicide à 65 ans, le 5 octobre 2015, à Paris. Sa mère Natalia était morte un an et demi plus tôt, en avril 2014, à 86 ans. Depuis, la cinéaste ruminait des idées noires et a été hospitalisée pour dépression.
Sources : Wikipedia. Date de création : 2016-01-14.