(Hyacinthe Jules Albert) Marcel Hébert voit le jour le 22 avril 1851, à Bar-le-Duc (Meuse).
Il manifeste très tôt une vive intelligence soucieuse des questions religieuses, ce qui l’amène au séminaire Saint-Sulpice en 1871. Ordonné prêtre en 1876, il devient curé à Olivet (Loiret). De retour à Paris, il enseigne à l’École Fénelon. Là, il marque un de ses élèves, Roger Martin du Gard, futur Prix Nobel de littérature. En 1895, il devient le directeur de cette école. C’est à partir de cette date qu’il se sent de plus, selon le mot d’Émile Poulat, « en marge de l’Église. »
Il sert cependant de trait d’union, selon Jean Lebrec, entre le Bulletin critique, fondé par Mgr Duchesne, qui applique la critique historique aux évangiles, et les Annales de philosophie chrétienne, avec Maurice Blondel ou Léon Ollé-Laprune. Cette dernière tend à renouveler l’apologétique fondée sur les miracles et les prophéties au détriment d’une façon de « justifier la foi par sa convergence avec les lois de la vie intellectuelle et morale ».
Extrait (de Jean Lebrec) :
« De l’un à l’autre groupe, servait de trait d’union un prêtre distingué, Marcel Hébert (1851-1916), collaborateur à la fois du Bulletin critique et des Annales ».
Des motifs proprement philosophiques, comme le problème du mal ou l’insatisfaction intellectuelle qu’il ressent devant le thomisme, l’ébranlent. Il est aussi sensible à l’hypothèse de l’évolution chez Darwin. Les recherches exégétiques de Louis Duchesne et Alfred Loisy remettent aussi en cause sa foi. En 1899, il publie, à compte d’auteur, pour la distribuer à quelques amis, une brochure anonyme intitulée Souvenirs d’Assises. La Revue blanche la rééditera en septembre 1902.
Dénoncé à l’archevêque de Paris, le cardinal Richard, comme l’auteur de cette brochure, on le destitue de sa charge de directeur de l’École Fénelon, en 1901. En 1903, il se défroque. Il donne alors, à l’Université nouvelle de Bruxelles, un cours intitulé Exposé critique du dogme chrétien, de 1903 à 1910. Son évolution et le contact avec les socialistes de Bruxelles le conduisent à des positions politiques de gauche, dans le journal Le Peuple :
« Que l’on admette encore ou que l’on rejette comme contredits par la critique historique les dogmes chrétiens, le fait est là incontestable, que le christianisme fut une prodigieuse poussée morale – qui nous a mis pour jamais dans la conscience, la faim et la soif de la justice, et le sentiment où nous sommes de travailler à sa réalisation ici-bas ».
De retour à Paris, il y poursuit son travail de réflexion. Il rédige, avant de mourir, un testament spirituel où il fait part d’
« une espérance, une confiance, qui s’adressent, non à une Personne, mais à l’énergie spirituelle dont nous avons été l’instrument et en laquelle nos efforts vers le bien sont indestructibles ».
Marcel Hébert meurt le 12 février 1916, à Paris.
Son ami Albert Houtin, autre prêtre moderniste, écrira sa vie sous le titre Un prêtre symboliste, Marcel Hébert (1851-1916). Rendant compte de cet ouvrage Henri Sée écrit :
« C’est l’abbé Duchesne qui ruina, chez son ami, la croyance à la résurrection de Jésus, et nous voyons que, pendant longtemps, l’un et l’autre ont été en parfaite communion d’idées. Mais en 1900, au moment où Hébert écrit ses Souvenirs d’Assises, Mgr Duchesne, directeur de l’École de Rome (…) se montre déjà singulièrement plus prudent. Ensuite, lorsque Marcel Hébert est déchargé de la direction de l’École Fénelon, Duchesne lui conseille de se rétracter, et enfin, devant le refus d’Hébert, prend un ton plus surprenant, déclarant qu’il a toujours cru à la résurrection. ».
Pour Pierre Colin, chez Hébert,
« le processus de la christologie néotestamentaire, illustre le moment de la spiritualisation du mythe avec le passage du Messie à La Sagesse personnifiée de Paul et au Logos de Jean. Dans le Nouveau Testament lui-même, un pas décisif est franchi du mode de penser juif au mode de penser grec, bref pour une hellénisation de Jésus comparable à l’hellénisation de Yahweh par Philon d’Alexandrie. »
Par la suite, la pensée théologique passera de l’image au concept et elle créera un véritable « mythe métaphysique ». Le programme intellectuel de Marcel Hébert est celui d’une sorte de démythisation :
« Il s’agit d’extraire de l’antique image d’un Dieu personnel ce qu’elle renfermait de vrai, à savoir la foi au Bien, à l’Idéal, et de sauvegarder vivante, joyeuse et efficace cette foi, tout en renonçant à l’image elle-même, survivance de la vieille idolâtrie, superstition introduite avec bien d’autres par l’esprit oriental dans le christianisme. Il s’agit de les remplacer par la mise en pratique enfin loyale et rigoureuse de cette justice, de cette solidarité qu’avaient entrevues le paganisme, et que la religion chrétienne a nettement affirmées, tout en les déguisant et étouffant sous trop de symboles. »
Sources : -. Date de création : 2021-09-10.