Dans un coin peu fréquenté du Père Lachaise, repose celle que l’on a surnommée « la fiancée de Robespierre ». Ce que l’on sait moins, c’est que cette sépulture renferme 11 membres de la famille Duplay ! Un petit encadrement délimite la tombe, restaurée en 1985 et signalée par une plaque. (Régis Dufour-Forrestier)
Maurice Duplay voit le jour le 22 décembre 1738 à Saint-Didier-en-Velay (Haute-Loire). C’est un entrepreneur de menuiserie et révolutionnaire français. En 1767, il se marie avec Françoise Éléonore Vaugeois (1739-1794). Citoyen actif de la section des Piques, c’est un propriétaire aisé. Il est père de cinq enfants : Éléonore, dite Cornélie (1768-1832), Sophie née en 1769, Victoire née en 1770, Élisabeth (1773-1859), future Mme Le Bas, et Jacques Maurice (1777-1847).
Ses trois maisons parisiennes lui procurent 15 000 livres de rente. En l’an IV, il achète, pour plus de 30 000 francs, la maison qu’il habite au 366 rue Saint-Honoré. Celle ci dépendait de l’ancien couvent de la Conception, vendu comme bien national. Le lieu porte actuellement le numéro 398. On peut y lire une plaque mentionnant le séjour de Robespierre du 17 juillet 1791 au 28 juillet 1794.
En 1791, après la fusillade du Champ-de-Mars, il accueille Robespierre chez lui. Jacobins fervents, les Duplay admirent l’Incorruptible, qui partage leur vie de famille jusqu’à sa mort. Maurice Duplay devient juré au Tribunal révolutionnaire. Le lendemain du 9-Thermidor, on arrête toute la famille et on la conduit à Sainte-Pélagie. On retrouve la femme de Maurice Duplay, âgée de 59 ans, pendue dans son cachot, le 11 thermidor.
Maurice Duplay est interné au Plessis. Il y retrouve Philippe Buonarroti, qui fréquentait sa maison à l’époque où il fréquentait Robespierre. Le 18 nivôse an III, on le transfère avec son fils, Jacques Maurice, étudiant de 16 ans, au Luxembourg. Compris dans le procès de Fouquier-Tinville, on l’acquitte le 17 floréal an III et on le libère. Inculpé dans l’affaire de la conjuration des Égaux, en l’an IV, il est acquitté par la Haute Cour de Vendôme, comme son fils.
Il décède le 30 juin 1820 à Paris. Parmi ses enfants, trois ont laissé un nom dans l’Histoire : Élisabeth, qui a épousé le conventionnel Philippe Le Bas, ami de Robespierre, Éléonore, et Jacques Maurice (1777-1847), fondateur en vendémiaire an XI du journal l’Indiscret puis membre de la Commission administrative des hospices civils de Paris. Il repose avec son fils, Jacques Maurice Duplay (1777-1847), le fondateur du journal L’indiscret, et sa fille Eléonore, dite Cornélie (1768-1832), la « fiancée » de Robespierre.
Extrait (de Lenotre (G.) Paris révolutionnaire, Firmin-Didot, 1895) :
« La maison Duplay, où Robespierre vécut pendant trois ans, est une construction modeste élevée seulement d’un étage, avec son entrée par une porte cochère rue Saint-Honoré. Au rez-de-chaussée, une cour étroite comprise entre le corps de logis des Duplay, un atelier où travaillaient les ouvriers, des hangars et le corps de logis donnant sur la rue Saint-Honoré qui comportait une boutique et deux grandes pièces au premier étage où s’établirent un temps le jeune frère et la sœur de Robespierre, avant que celle-ci ne se brouille avec Mme Duplay ».
Au-dessus de l’atelier, trois petites chambres donnent sur la cour, celle de Robespierre, puis celles du fils et du neveu du menuisier. Ce dernier a la jambe gauche emportée à la bataille de Valmy, on l’appelle donc « Duplay à la jambe de bois ». En 1793, la maison n’a qu’un étage. La chambre de Robespierre est au-dessus de la fontaine.
En 1792 ou 1793, Duplay remplace l’escalier principal qui dessert les chambres et le corps de logis de la rue Saint-Honoré par un escalier de bois plus discret, à l’autre extrémité de l’aile, afin de mieux garantir la sécurité de son hôte. Par cet escalier, on accède à la chambre de Robespierre, précédée d’un petit cabinet servant de toilette et d’antichambre.
« Elle ne contenait, écrit Lenotre, qu’un lit de noyer couvert de damas bleu à fleurs blanche, provenant d’une robe de Mme Duplay, une table et quatre chaises de paille : c’était à la fois son cabinet de travail et sa chambre à coucher. Ses papiers, ses rapports, les manuscrits de ses discours étaient classés avec soin sur des rayons de sapin contre la muraille. »
Sources : Felkay (Nicole), Favier (Hervé) Souvenirs de J.-B. Billecocq (1765-1829) en prison sous la Terreur, Société des études robespierristes, 1981, p. 52 ; Couret (Emile) Le pavillon des princes : histoire complète de la prison politique de Sainte- Pélagie depuis sa fondation jusqu’à nos jours, 1891, p. 56 ; Lenotre (G.) Paris révolutionnaire, Firmin-Didot, 1895, p.17 ; Wikipedia ; Thierry Engels. Gravures: G. Lenotre (1895). Date de création : 2108-04-24.